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samedi 27 octobre 2012

Prune cherche son style


Par Séverine Vidal, illustré par Kris Di Giacomo, Frimousse, Prune 4

«Prune cherche son style, et après plusieurs tentatives du type "Rebell’s" ou "Monochrome", elle finira par revenir à l’essentiel et finalement se rendre compte que du style... elle en a!»

Prune un jour, Prune toujours! Un quatrième opuscule déjà pour cette héroïne à l'humour délicieux et au verbe truculent. Cette fois, par contre, la trame manque un brin de ressort. Si la prémisse est intéressante (on se demande bien quels styles étranges séduiront l'inimitable Prune), l'intérêt s'émousse en chemin; à se demander s'il y avait vraiment assez de matière pour une nouvelle aventure prunesque. Toutefois, si l'histoire est un brin maladroite, la verve de l'héroïne fait sourire de bon coeur. Et puis, il y a le chaleureux et cocasse univers de Kris Di Giacomo qui, cette fois, sauve la mise en relançant habilement la narration, multipliant les apartés visuelles, et racontant à sa manière les tribulations rocambolesques de Prune et de sa bande. À feuilleter tout de même, parce que Prune, elle est indémodable!

Lili lui donne: ★ ★ ★ ☆ ☆




vendredi 26 octobre 2012

Dans la nuit blanche et rouge


Par Jean-Michel Payet, Grandes Personnes

«Pétrograd, février 1917. Dans une Russie tsariste épuisée par des années de guerre, où grondent la famine et le mécontentement, la comtesse Tsvetana Kolipova, 17 ans, rêve d'un monde qu'elle voudrait plus juste. Contribuant à une revue clandestine, la jeune fille découvre bientôt un secret familial qui va balayer ses repères et la propulser dans le tourbillon de la Révolution.»

Plongeon haletant dans le tumulte de la Révolution russe de 1917. Jean-Michel Payet détricote avec habileté l'inextricable contexte socio-politique de l'époque, narrant avec précision le destin mouvementé et déchirant d'une galerie de personnages auxquels on s'attache dès les premières lignes. Si les rebondissements sont malheureusement un poil prévisibles, et qu'un resserrement de l'intrigue aurait été profitable (en diminuant le nombre de points de vue différents d'un même événement par exemple), il s'agit malgré tout d'un tour de force littéraire, un cours d'histoire prenant, transmis au lecteur par le biais de judicieux chapitres courts, articulé dans une langue d'une fine simplicité. Et, phénomène rare, la jeune héroïne de 17 ans, Tsvetana Viktorovna Kolipova, fait face à l'improbable et à l'inattendu non pas avec une maturité adulte factice (comme c'est trop souvent le cas en littérature pour la jeunesse), mais bien avec toute la fougue, les doutes, les hésitations et l'insouciance d'une jeune femme venant tout juste de tourner le dos à l'adolescence. Un opus bien dodu, dur, âpre, inflexible comme ont pu l'être toutes les parties impliquées dans la Révolution (les tsaristes, comme les Bolcheviks), mais aussi rafraîchissant de candeur et de sensibilité; un savoureux paradoxe à découvrir...


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ☆

dimanche 21 octobre 2012

La légende du chien noir


Par Levi Pinfold, Scholastic

«Un jour, un chien noir vint rôder autour de la maison de la famille Lespérance. Le père fut le premier à l’apercevoir...»

Sublime incursion dans le monde mystérieux et irrationnel de la perception. Levi Pinfold tricote une histoire tout simple, mais si fine, si juste qu'on ne peut que tomber sous son charme. D'autant plus qu'il plonge judicieusement le lecteur dans un univers visuel au charme vieillot, fourmillant de détails savoureux et enrichissant habilement la narration par son imaginaire cocasse et ses propositions alternatives. Un incontournable petit bijou de bibliothèque, pour les petits et les grands, que vous ne pourrez vous empêcher de relire encore et encore. Exquis. Tout simplement.


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ★




Pour le lire en version originale

lundi 15 octobre 2012

La petite fille dans la tête - où l'on comprend qu'on peut avoir cinq ans toute sa vie


Par Marie-Aude Murail, illustré par Rosa Morel-Flouzat et Benoît Morel, Oskar jeunesse, Trimestre


«Il y a une petite fille qui vit dans la tête d’une grande personne. Elle a 5 ans, mais elle est beaucoup plus petite qu’une petite fille de cinq ans puisqu’elle tient dans la tête de la grande personne. On ne sait pas si cette petite fille a des parents. Elle, elle pense qu’elle en a, mais qu’ils ont dû faire un long voyage. Son papa est le roi. Sa maman est la reine. Elle est la princesse. Quand elle attend son papa et sa maman, elle s’assoit sur une chaise en paille, toute petite, qui se trouve dans la tête de la grande personne. Il n’y a pas grand-chose à faire dans la tête de la grande personne. Il n’y a pas un seul jouet. Il n’y a pas d’autres enfants. Il n’y a même pas de maîtresse d’école. Il faut dire que c’est vraiment petit dans la tête de la grande personne. »

Voyage troublant au coeur de la vie et de son cycle perpétuel. Marie-Aude Murail murmure au lecteur une histoire douce et mélancolique, escapade juste et tendre dans les méandres de l'âme humaine. L'univers visuel de Benoît Morel, tout simple, à la candeur ébouriffée, souligne avec finesse le déroutant paradoxe de ce texte singulier: la vulnérabilité et la force vive qui semblent être les pierres angulaires de cette fameuse petite fille. Un opuscule remuant à ne pas manquer.


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ★ 


Paru en 1993, chez Milan, illustré par Olivier Poncer,
 sous le titre: «Son papa est le Roi»


vendredi 12 octobre 2012

Sans le «A»: anti-abécédaire


Par Michaël Escoffier, illustré par Kris Di Giacomo, Kaléidoscope

«Une seule lettre manque et le sens du mot change complètement. Cet abécédaire humoristique amène l'enfant à réfléchir tout en lui apprenant à lire.»

Un abécédaire délicieusement sournois et saugrenu qui fait travailler joyeusement les méninges et pédaler la machine-à-idées. Michaël Escoffier signe ici un petit bijou littéraire, aux possibilités infinies, soutenu par l'univers visuel cocasse et habilement déjanté de Kris Di Giacomo. Un incontournable à mettre entre les mains de tous les amoureux des mots!


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ★ 

A Little Princess


Par Frances Hodgson Burnett, Collector's Library

«When young Sara Crewe is brought from India to London by her doting father to join Miss Minchin's school, she can have little idea of the change in circumstances that lie ahead. While at first her life of privilege continues, the tragic death of her father and failure of his business change everything. In a dramatic reversal of the tradition fictional "rags to riches" formula, Sara plunges from privilege to penury in the space of one day. Now she is no longer a princess but a beggar, and must depend on the power of her imagination and optimism and the kindness of strangers to lift her above the misery of her circumstances. She is cast out from the comfort of her rooms as Miss Minchin's 'show pupil' into the chill despair of a lonely garret, and set to endure back-breaking work in the school. But if humility, patience and dignity are virtues to be rewarded, will Sara perhaps experience another reversal in her fortunes?»

Un classique de la littérature jeunesse qu'une de mes collègues, libraire jeunesse, m'a sommée de découvrir. Et elle avait vu juste: j'ai été charmée dès les premières pages... Frances Hodgson Burnett plonge le lecteur au coeur d'une Londres encore victorienne, dans l'univers de Sara, où les personnages archétypaux sont légions et où le Bien triomphe sur le Mal inexorablement. Or, si de prime abord, on se méfie d'une plume potentiellement dégoulinante de bons sentiments, on se laisse rapidement porter par l'histoire qui, bien que convenue, jongle si habilement avec les différents caractères des personnages et l'implacabilité du Destin (entravant les desseins de l'héroïne ou lui donnant un coup de pouce, tour à tour) qu'on ne peut que se laisser envoûter par la finesse de l'intrigue. Frances Hodgson Burnett parvient à tricoter avec justesse et éloquence une histoire délectable et sans âge, menée avec aplomb par Sara, l'héroïne qui se bat pour exister envers et contre tous. Un opus qui ne laissera aucun lecteur indifférent...


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ★  


Pour le lire en version française

mercredi 10 octobre 2012

Parce que


Par Agnès Laroche, illustré par Stéphanie Augusseau, Alice Jeunesse, Histoires comme ça

«Trop de "pourquoi", cela peut vite devenir irritant. Pour Nicodème comme pour ses parents...»

Un deuxième opus pour Nicodème, à la timidité si charmante. Malheureusement, si la plume d'Agnès Laroche tricote habilement un quotidien cocasse pour l'inénarrable Nicodème, la magie n'opère pas cette fois. Le fil de l'histoire est légèrement ténu et la chute, un poil maladroite. Tellement dommage... Par contre, que du bonheur en dévorant les illustrations de Stéphanie Augusseau des yeux! Comme dans Nicodème, elle sait faire vivre avec sensibilité et tendresse ce petit bout d'homme candide et attachant, au coeur d'un univers visuel tout en douceur et émotions. À feuilleter donc... malgré tout.


Lili lui donne: ★ ★ ★ ☆ ☆



dimanche 7 octobre 2012

Mingan, mon village


Par des écoliers innus, illustré par Rogé, La Bagnole, Modèles uniques

«Rogé a visité l'école de Mingan, un village innu au nord-est du Québec. Il y a passé quelques jours, histoire de prendre le temps de photographier chacun des écoliers. Rentré chez lui, dans son atelier des Îles-de-la-Madeleine, un pinceau à la main, il a revisité le regard de ces enfants.De ce séjour à Mingan, Rogé a gardé quinze visages, et quinze textes, des poèmes écrits par les jeunes Innus.»

Une touchante bouffée de grands espaces et d'éternité. Ces jeunes Innus savent dire la nature, et la vie, et la mort avec une plume juste et sensible (il y a du Robert Lalonde en devenir chez certains de ces poètes en herbe!); un plongeon privilégié au coeur d'une culture méconnue, offert avec générosité et authenticité. Rogé a fait un travail admirable en construisant cet album, sélectionnant judicieusement les textes, alternant les longs poèmes, avec les courts, ou la prose afin que chacune de ces petites poésies s'épanouisse et bouleverse le lecteur, puis mettant un visage sur chaque plume, de sa palette aux mille textures, aux teintes sourdes et à l'éloquence tendre. Un petit bijou qui chamboule et qui émeut, dont les concepteurs ont su s'effacer humblement, laissant ainsi toute la place aux mots vibrants de cette jeunesse innue. Superbe!


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ★ 

vendredi 5 octobre 2012

Fall of Giants

Par Ken Follet, Dutton Publishing, The Century Trilogy 1

«Now, Ken Follett takes readers on a new journey in Fall of Giants. This magnificent new historical epic, and the first novel in The Century Trilogy, traces the fortunes of five interrelated families—one American, one English, one Welsh, one Russian, and one German—as they are buffeted by the extraordinary events of World War I, the Russian Revolution, and the women's suffrage movement.»

Je viens tout juste d'émerger, pantelante, de ce spectaculaire plongeon dans l'histoire mondiale du début du vingtième siècle... Quel travail de maître! La plume de Ken Follet trace avec habileté, justesse, et souci d'authenticité historique, un portrait enlevant de la Première Guerre mondiale, des années précédentes (où tout s'est décidé entre une poignée de diplomates et de «grands» de ce monde) et des années suivantes ayant porté le long processus de la signature d'une armistice discutable (et discutée!). Un défi herculéen si on prend pour acquis que le lecteur connaît déjà la «chute historique» de l'intrigue et que Follet parvient tout de même à captiver, sans faillir, jusqu'à la toute dernière page. En ce sens, l'approche morcelée de Follet, invitant à faire connaissance avec cinq familles d'origines diverses et dont le destin se croise pour le meilleur et pour le pire, dynamise la part importante de faits historiques intégré avec brio dans son intrigue; en choisissant de proposer des chapitres relativement courts et en passant d'une famille à l'autre, sans s'éterniser plus que nécessaire, Follet pique la curiosité du lecteur et lui permet d'apprécier le déroulement de l'action, même à travers les yeux d'une famille qui peut lui être moins sympathique. Il s'agit de la leçon d'histoire la plus envoûtante et surtout, la plus intéressante et efficace que j'ai eue, par l'entremise d'un roman. Si j'ai déjà hâte de lire la suite, je tiens à souligner que Follet signe ici un roman complet en soi, qui tout en donnant le goût de poursuivre l'aventure au sein de ce siècle marquant, pourrait très bien se terminer ici, l'auteur n'ayant pas succombé au besoin de laisser le lecteur artificiellement en haleine en proposant une fin incomplète (ce que j'admire énormément et qui est devenu rare). Une réussite absolue!


Lili lui donne: ★ ★ ★ ★ ★  



Pour le lire en version française